Elle comprit que je la prenais en photo puisqu’elle se leva. Je crus d’abord que ça la gênait et qu’elle s’en allait mais je compris très vite que non. J’aurais du m’en douter, je ne savais que trop bien combien elle aimait être regardé. Je n’avais pas bougé mon appareil, je continuais à prendre chacun de ses geste en photo. Elle était tellement gracieuse. Elle semblait tellement différente aussi. Je n’aurais pas pu vous donner les raisons de mes pensées mais je la trouvais jolie. Bien plus que toutes les fois où je l’avais vu. Non, elle irradiait quelque chose qui me donnait envie de la prendre en photo, bien sur, ma fierté d’homme m’aurait empêché de le lui avouer. A ma grande surprise, elle se prêta au jeu. Cette fille que je ne connaissais que de vue et de nom, acceptait de se faire photographier sans rien en échange, je n’en étais que plus heureux. Elle tournoyait, ses cheveux se soulevant au rythme de sa course, elle était tellement élégante. Enfin, son rire parvint à mes oreilles. Je crus d’abord rêver mais ne laissa rien paraitre. Était-ce pour moi qu’elle riait ? Était-elle si heureuse que je la prenne en photo ? Sa candeur du moment me fit penser à une enfant. Et le contraste entre celle dont on me parlait et celle qui se tenait devant moi était flagrant. Non, elle était simplement heureuse de pouvoir être une fois de plus, au centre de l’attention. Sur mes photos qui plus est, elle n’en serait que plus jolie. (modestie, quand tu nous tiens.) Je me permis un sourire bref, caché derrière mon appareil. Je la regardais s’avancer. Ne loupant aucun de ses gestes.

Il était évident qu’elle était faites pour poser. Son naturel du moment me rendait fou, dans le sens où elle déclenchait en moi des idées pour mes photos. Elle était un bon model, je ne pouvais pas lui enlever cela, personne ne l’aurait fait sans doute d’ailleurs. Je baissais ensuite quelques instants mon appareil. De façon à réfléchir. Cependant, mes yeux n’étaient pas posés sur elle. Preuve que je ne m’intéressait pas à elle plus qu’à une autre. Après quelques secondes, je reportais l’appareil à mon visage de façon à pouvoir capturer sa réaction, ses gestes et tout le reste. Je ne savais que trop bien qu’elle n’apprécierait pas le fait que mes yeux n’ait pas croisé les miens. Ou du moins, que je n’ai pas daigné posé autre chose que mon objectif sur elle. Dans la mesure où j’avais plusieurs fois vu qu’elle m’observait, j’avais fait en sorte de ne pas la laisser nourrir l’espoir que je m’intéressait à elle maintenant. Bien sur, tout cela était faux. Mais elle n’était pas sensée être au courant. Dans un geste de la main, je lui indiquais d’approcher encore, je voulais pouvoir la photographier de plus prés. Capturer chaque traits de son visage.

▬ Viens. Lui ordonnai-je simplement.

Ma voix ne s’était pas faites dure ou autres. Non, neutre, dénuée d’émotion alors que dans ma gorge, toutes ces émotions que je chassais se débattait pour sortir. C’était assez étrange mais je préférais mettre ça sur le compte de l’inspiration trouvée. Je me sentais à ma place, là, derrière mon appareil et je le savais. C’est sans doute ce qui faisait que je continuais à m’en servir. Si je ne m’y sentais pas aussi bien, j’aurais déjà cessé la photo. Je continuais de prendre des photos. Plus lentement cependant, comme si j’attendais de trouver ce que je cherchais jusqu’alors. Sa robe me fit sourire, si bien que je ne pus m’empêcher d’en prendre une partie en photo. Il n’y avait rien de mal là dedans. Lorsqu’elle fut près de moi. J’attrapai son poignet instinctivement pour la faire s’asseoir sur le banc. Une fois cela fait, je me levais et me permis de prendre une photo de plus près, la plus belle sans doute. Je me fichais du fait que mes gestes puissent la déranger, si elle acceptait d’être prise en photo, elle devait se plier aux exigences du photographe.

J’avais rêvé d’elle une fois. J’avais rêvé de son corps étendu dans mes draps. Non, pas de rêve qui n’aurait rien de catholique. Elle y était seulement allongée et regardait le plafond. Mais tout en elle me captivait. Chaque mouvement qu’elle faisait devenait comme l’une des merveilles du monde. Dans mon rêve, seulement. J’étais assis quant à moi, sur une chaise et je la regardais. Je regardais ses longs cheveux se perdre au milieu des draps. Je regardais ses grands yeux fixer le plafond. Je regardais tout ce qui avait un quelconque rapport avec elle. Je regardais aussi le simple t-shirt blanc qu’elle portait, découvrant ses jambes pareilles à un aimant à caresses. Puisque face à pareil atouts, un homme ne pouvait penser à autre chose qu’à poser ses mains dessus. Je ne bougeais pas cependant, perdu dans ma contemplation. Elle s’offrait à moi pourtant, d’une façon silencieuse. Allongé sur mon lit, à fixer mon plafond. Ce n’était qu’un rêve mais elle me le rappelait certaines fois, bien sur, un rêve tenu secret et un rêve dont je ne parlerais sans doute à personne. Rares étaient les fois où je me souvenais de mes rêves mais celui-là, je voulais le garder jalousement.

Son dos rentra en contact avec le banc, elle s’y allongeait le plus simplement du monde. Je fus surpris sur le coup. M’offrait-elle la possibilité de faire d’elle ce que je souhaitais ? Sans doute. Elle ne parlait pas. Ce qui était un bon point pour elle, comme je l’avais déjà mentionné, j’avais horreur qu’on me parle lorsque je me concentrais. Je posai doucement mon appareil, de façon à pouvoir m’occuper de la placer. Elle était parfaite ainsi, mais quelque chose me gênait. Je me penchai un peu, remis une mèche de ces cheveux en place. C’était mieux ainsi. Ainsi vêtue, dans sa robe blanche, elle aurait pu rappeler à quelqu’un qu’elle ne connaissait pas; la pureté. Cela dit, je savais qu’elle était loin d’être pure. Je pouvais jouer avec elle. Sans doute différemment des autres hommes qu’elle avait connu. Ca me donnait l’impression d’être unique. Puisque la plupart des hommes l’aimaient pour autre chose que pour son quotient intellectuel. Je ne dis pas que c’était ce qui m’intéressait le plus pour l’instant, mais vous avez compris je pense. Je repris mon appareil et la reprit en photo. Elle irradiait encore plus maintenant que j’étais près d’elle, je pouvais la sentir sans la toucher et c’était assez bizarre. Je mettais ça sur le compte de ma folie.

Le bruit de mon appareil cessa. Je faisais une petite pause. Baissant enfin l’objectif, mon regard croisa le sien. Je le regrettai aussitôt. Je savais que si elle arrivait à accrocher mon regard plus longtemps, elle aurait raison de moi et qu’au final, je pourrais finir comme les autres. C’est pourquoi je détournai vite les yeux. Comme un enfant qui fuit le regard de sa mère en colère. La comparaison est assez bizarre mais c’était à peu prés ça. Je me permis un bref étirement de lèvres, à cette pensée. Elle ne ressemblait en rien à ma mère et était loin d’être terrifiante. Après tout, elle était une femme comme les autres. J’en avais croisé pas mal depuis ma naissance mais elle, elle.. En fait, je ne savais pas comment l’expliquer. Je n’y pouvais rien. Je décidai de prendre la parole. Simplement.

▬ tu peux t’en aller si tu le souhaites.

Je ne le voulais pas, ça allait de soit. Mais j’accompagnais mes paroles d’un haussement d’épaules, comme si ça m’était égal finalement qu’elle soit mon model. Elle plutôt qu’une autre, quelle était la différence ? C’est un peu le message que je voulais lui faire passer. Après tout, nous ne nous connaissions que de regards et de noms, nous n’avions jamais eu de vrai discussion. Je ne lui accordais pas plus d’importance à une autre. Quels signes auraient pu me trahir ? Ma façon de la photographier sans doute. Ce n’était pas comme avec les autres. Mais je me doutais bien qu’elle ne le saurait pas. M’avait-elle simplement déjà regardé photographier autre chose qu’elle ?

J’avais peur. Peur qu’elle s’en aille alors que j’étais celui qui l’avait incité à ce départ. J’avais simplement peur qu’elle s’en aille et que de cette façon, je ne puisse plus penser à elle. Que je ne puisse plus la voir si différente. Comme si elle était sans défense, bien que ce fut exagéré. Elle était d’une beauté intolérable, si bien, que je ne pus m’empêcher de me retourner pour la regarder. Lorsque sa voix me parvint, je fus comme, soulagé. Je n’aurais pu vous donner les raisons de ce soulagement. J’étais simplement heureux qu’elle ne se soit pas envolée. C’était sot, mais que voulez-vous ? Rares étaient les occasions comme celle-ci. Elle déclara ensuite qu’elle pensait que poser n’était pas pour elle. Boah, tant pis, je trouverais bien d’autres filles prêtes à poser pour moi. Elle avoua ensuite qu’elle était rarement naturelle. Je ne pus empêcher le coin de mes lèvres de se soulever. Ce n’était pas tombé dans l’oreille d’un sourd, mais d’un côté, j’étais heureux de l’apprendre. J’avais encore beaucoup de chose à apprendre d’elle. En avais-je seulement le droit ? Non. Je devais rester l’homme inaccessible. Je refusais de devenir l’un des hommes qu’elle obtenait d’un claquement de doigts, bien que la tentation était grande.

▬ nous jouons tous la comédie, du moins, c’est mon point de vue.

J’ignorais encore pourquoi j’avais prononcé ces mots. Peut être pour la rassurer, ou peut être pour lui faire croire que ça n’était pas important ce qu’elle venait de me divulguer alors que c’était tout le contraire. J’avais accompagné mes paroles d’un haussement d’épaules. La désinvolture né. Je ne voulais pas qu’elle me comprenne. Je ne voulais pas qu’elle sente mon cœur s’accélérer. Je ne voulais pas qu’elle puisse s’approcher et me tenter encore plus. Qu’elle reste loin, oui, c’était parfait ainsi. Elle ne pouvait m’atteindre de cette façon. Elle reprit ensuite la parole, avouant qu’elle était heureuse que je la prenne en photo. Je levai les yeux aux ciels alors que j’avais envie de sauter. Je souriais de l’intérieur. Ravi qu’elle apprécie avoir mon objectif pointé vers elle. D’ailleurs, je portai une nouvelle fois mon appareil à mon visage pour prendre une autre photo d’elle alors qu’elle me faisait part d’une chose assez intéressante. Oui, elle pensait que je n’utiliserais pas ses photos à des fins obscures. Qu’en savait-elle ? Elle ignorait tout de moi.

▬ en es-tu certaine ?

Je me permis un bref sourire lugubre. Je savais qu’elle n’aurait pas peur, elle se poserait seulement quelques questions. Je fis un pas en avant, pour je ne sais quelle raison et je repris mon appareil en main.

▬ tu ne sais rien de moi, ne l’oublie pas.

Oui, je ne sais rien de lui. N'est-ce pas de sa faute si c'est le cas ? Il a toujours son appareil en main, près à me prendre en photo à n'importe quel moment. Une nouvelle fois, je me lève. Pas pour partir. J'ai mieux à faire. Machinalement, je lisse ma robe. Geste habituel, je veux toujours être impeccable. Puis je tourne le visage vers lui. Il tient son appareil fermement, mais ne le pointe pas dans ma direction. Je suis debout, et ça le gène. Je marche dans sa direction, et les battements de mon cœur résonnent à mes oreilles. Plus je me rapproche, et plus j'ai l'impression qu'il va sortir de ma poitrine. Calme toi, ce n'est que... qu'Adam. Ce n'est qu'un garçon, parmi tant d'autres. Non non, mensonge, me répond mon cœur. Tais-toi. Non, toi, tais-toi. Conversation avec moi-même, je déteste avoir tort. Je suis à la hauteur du photographe. Je prends délicatement son appareil, et le pose au sol, un peu plus loin, pour nous éviter l'erreur de marcher dessus. Et puis je retourne au niveau du garçon, qui ne cille pas. Cette fois ci, mes doigts s'enroulent autour de ses poignets. Je loupe un battement. Tais-toi mon cœur, c'est indécent. Je regarde Adam droit dans les yeux. Pour mon plus grand bonheur, ses yeux ne se détournent pas des miens.

─ je n'ai pas peur de toi.

Nos visages sont si proches, je sens son souffle chaud sur mon visage, dans mon cou... Mes doigts caressent l'intérieur de ses poignets. Non, je n'ai pas honte. C'est de la provocation, rien de plus. J'attends simplement de voir, d'entendre peut-être, ce qu'il va répondre à ça. Et pendant ce temps là, pendant tous le temps que j'attends, mon cœur s'emballe, bat la chamade, à en perdre haleine.

Taniyah prit mon appareil. Je la laissais faire, se rendait-elle compte qu’elle tenait une grosse partie de ma vie entre ses mains ? Sans doute pas. Je ne bougeais pas, comme paralysé par une force inconnue. Elle revint se positionner près de moi. Ses doigts frêle vinrent s’enrouler autour de mes poignets et je me sentis frissonner. Que cherchait-elle au juste ? Je n’aurais su le dire. Je savais seulement que j’aurais préféré qu’elle reste loin de moi, qu’elle me facilite les choses. Son regard se planta alors dans le mien. Je n’arrivais pas à fuir son regard et même si je le faisais, ça me faisait lui avouer qu’elle gagnait quelque part. Elle déclara par la suite, le plus simplement du monde, qu’elle n’avait pas peur de moi. Heureusement que je n’étais pas un détraqué ou autres. J’haussai les épaules doucement, si j’allais trop vite, je perdais le contact de ses doigts sur ma peau. Pouvais-je seulement prétendre à ce contact sans rien lui offrir en retour ? Pas même une attention ? Oui. Parce que c’est- ce que je fis. Elle n’eut le droit à aucun mouvement de ma part, rien qu’y puisse la laisser penser que je rendais enfin les armes. Ses doigts caressaient l’intérieur de mes poignets avec une telle douceur que j’eus peur de ne pas réussir à me contenir. Nos visages étaient bien trop prêts à mon gout, ou plutôt, au gout de ma raison. Que voulait-elle ? La question me brulait les lèvres, qu’attendais-je ? Mes yeux n’avaient pas quitter les siens. Était-il seulement possible que je regarde quelque chose d’autres ?

▬ que cherches-tu ?

La question était enfin sortie. Je n’avais pu la retenir. Tant pis. Que penserait-elle ? Que je ne veux pas d’elle ? Je l’espérais. Pourtant, mentir était sans doute la mauvaise option. Mais que faire alors ? Abandonner et la laisser faire ce qu’elle veut de moi ? Bien sur, je désirais la sentir frémir sous mes doigts mais après ? Aurais-je seulement le droit à une attention ? Non. Je ne pouvais pas. Je ne devais même pas y penser, elle ne m’aurait pas. Alors par pitié, qu’elle s’éloigne.

La douceur, la chaleur de sa voix qui se mêlent aux battements furieux de mon cœur. Ce besoin qu'il a de n'exprimer aucun sentiment. Cette douleur qui me prend à la gorge, au ventre, qui serre mes entrailles à m'en donner la nausée, qui obnubile mon cerveau, y verse le brouillard et le doute. Aussi innocent puisse t-il être, il me pose les mauvaises questions. Il connait les réponses. Mes yeux se fondent encore dans les siens, puis change de trajectoire. Je regarde à ma gauche, délie mes doigts de ses poignets. Le bout de mes ongles se frottent contre sa peau blanche, y laisse des traces infimes. Je ne le regarde plus. Pour la première fois, je ressens le besoin de ne plus le regarder. Cette proximité me gène, ces mots me troublent.

─ un peu d'attention. Autre que celle du photographe.

Je ne sais pas pourquoi je dis ça. Pourquoi je dis la vérité en sa présence, pourquoi je me révèle comme ça, alors que je ne devrais pas. Il a ce pouvoir sur moi que les autres n'ont pas. Cette capacité à fêler ma carapace, à me découvrir un peu plus à chaque minute. Je le déteste. Je dois retrouver la Tiji que je suis, je dois arrêter d'être cette enfant à qui on a dit qu'il ne fallait jamais mentir, et qui applique les règles à la lettre. Je dois tous faire pour qu'il arrête de voir en moi comme dans un livre ouvert. Et il n'y a pas trente-six milles moyens. Je pars. Je le laisse là, sur cette place. Je commence à m'éloigner. Je ne peux plus continuer comme ça. Être attirer par lui, sentir mon pouls s'accélérer dès qu'il pointe l'objectif vers moi ou dès que son regard se pose sur le mien. Stop stop stop. Je m'éloigne de plus en plus. Je divague, je suis conne. Je meurs d'envie qu'il me retienne, mais pour quoi faire ? Continuer à jouer à chat ? Je suis totalement perdue. Je crois le mener par le bout du nez, mais c'est lui qui tire les ficelles.
Mais ne me laisse pas partir, imbécile. Retiens moi, empêche moi de fuir. Reste avec moi, soi avec moi. Ne me laisse pas te laisser.

Je sentis ses doigts quitter ma peau. Je sentis également mon cœur s’emballer. Elle voulait de l’attention, autre que celle du photographe. C’Est-ce qu’elle m’avait dit. Je la vis alors s’en aller. Me laissant seul sur cette place. « Non! » les mots ne voulaient pas sortir, enfin, ce mot ne voulait pas. Il restait coincé dans ma gorge alors que je désirais sa présence. Je la voulais, ni trop près, ni trop loin de moi. Était-ce seulement mal ? Je ne savais pas quoi faire, quoi dire. La retenir ? La laisser partir ? Elle marchait, je la suivais des yeux. Si je me laissais le droit de la laisser partir, je la perdais. Si je la rattrapais, je me perdais. Je n’avais que peu de temps pour réfléchir. Je détestais ça, agir sous le cou de la pression. Seulement, je ne pouvais pas, non, je ne voulais pas la laisser partir. Je me mis alors à courir vers elle. Il ne me fallut pas bien longtemps pour la rattraper. Ma main se referma sur l’un de ses poignet et je m’arrêtai. La forçant ainsi à stopper sa course. Les yeux baissés, j’ignorais si elle avait tourné la tête. Je savais cependant qu’elle devait attendre quelque chose. Un mot, un geste, n’importe quoi. Je ne savais que dire. Malgré tout, je me devais de rester prudent.

▬ reste, finis-je par lâcher à voix basse, s’il te pait.

Ca ressemblait plus à une prière. Je voulais la garder. Je relevais alors les yeux en lâchant son poignet pour découvrir son regard. J’étais sincère. Je la voulais vraiment. Je lui fis un petit sourire, pour qu’elle ne m’en veuille pas. M’en vouloir de quoi ? De ne pas être assez sot pour tomber dans ses filets ? De ne pas vouloir d’elle ? Si seulement elle savait l’effet qu’elle produisait chez moi. Je me sentais tressaillir à chacune de ses approches. Je ne pouvais rien pourtant. Je n’avais pas la force d’empêcher cela. « idiot » pensai-je alors. Oui, j’étais une idiot fini mais qui me le reprocherais ? Je ne savais pas comment m’y prendre avec elle. Partagé entre le désir de la serrer contre moi et de la laisser partir, j’avais opté pour la rattraper mais je ne me laissais pas aller au point de la serrer entre mes bras. Je voulus alors l’encourage à courir, courir encore et encore. Me laisser lui courir après pour la rattraper, parce que bizarrement, j’aimais les sensations que ça déclenchait. J’aimais sentir mon cœur battre si fort. Je devais être fou.

▬ j’avoue ne pas te comprendre.

Je me rendis alors compte qu’elle pourrait mal le prendre, je pinçai les lèvres automatiquement. Je n’arrivais pas à saisir son manège même si j’en connaissais les motivations. Je ne savais plus quand elle était sincère et quand elle ne l’était pas. J’avais devant moi une femme bien différente. Une femme que je pourrais apprécier plus que l’autre, sans doute. Une femme que je désirais violemment et dont je devais me protéger.

▬ je crois que je m’exprime mal, pardon. Je veux simplement dire que tu peux avoir tous les hommes que tu veux et c’est mon attention que tu veux ?

Je m’enfonçais ? Peut être, mais cette question me troublait. Fallait-il donc savoir lui résister pour qu’elle nous désire en retour ? Fonctionnait-elle ainsi ? C’était donc uniquement le jeu qui l’intéressait ? Allez savoir.

La froideur de ses doigts serre mon poignet frêle. Il me laisse deux options. Rester, ou partir. Il croit vraiment que je veux m'en aller ? Maintenant qu'il m'a arrêté dans ma course, je ne vois plus aucun moyen de m'en aller. Il me prie de rester. Un frisson court le long de ma colonne vertébrale, meurt au creux de mes reins. Je me sens électrisée. Je le désire, c'est violent, c'est inévitable. Je me retiens tant bien que mal, surtout mal en fait. Je mords ma lèvre inférieure avec force, j'aimerais presque sentir le gout du sang. Lui, cet être inaccessible, qui se joue de moi sans vergogne, sans remords apparents, me demande de rester. Il ne me regarde plus, il regarde le sol plutôt. Passionnant en effet. Je ne le force pas à lever le regard. S'il ne le veut pas, il vaut mieux que je le laisse. D'ordinaire, je forcerais. Mais là, non. il me semble trop vulnérable.

─ les autres ne m'intéressent pas. Ils sont fades, sans intérêt. Ils me regardent parce qu'ils ne savent rien faire d'autre. Ils me suivraient au bout du monde si je leur demandais. Ils se tueraient si je leur ordonnais. Mais toi...

Je m'arrête là. Il sait très bien ce que je veux dire. Je libère mon poignet de sa main, j'espère secrètement qu'il va le reprendre. Ou attraper ma main, lier ses doigts aux miens. Ne demandons pas la lune, tous de même.

─ je veux ton attention parce que tu semble être le seul à me résister.

Et ça me plait, j'ai envie d'ajouter.